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Revue de littérature - Mars 2018

Revue de littérature SFCO Mars 2018. Pr. Philippe Lesclous


The influence of dental treatment on the development of osteoradionecrosis after radiotherapy by modern irradiation techniques

Schweyen R, Stang A, Wienke A, Eckert A, Kuhnt T, Hey J. Clin Oral Invest 2017, 21: 2499-2508.

Résumé :

La mise en état buccal avant une radiothérapie (RT) cervico-faciale a fait l’objet de nombreuses recommandations de bonne pratique, en particulier en ce qui concerne la gestion des foyers infectieux bucco-dentaires. Celle-ci doit être rapide compte tenu du délai très court généralement imparti avant le démarrage de la radiothérapie. Le taux d’ostéoradionécrose (ORN) rapporté dans la littérature est d’environ 40% avec pour conséquences de fortes limitations fonctionnelles et d’importantes séquelles esthétiques. Les progrès techniques de la RT permettent aujourd’hui de moduler l’intensité et le champ du rayonnement en fonction de la tumeur à traiter et donc d’envisager des conduites plus conservatrices sur le plan dentaire. L’objectif principal de cette étude était d’analyser l’influence des traitements dentaires et surtout des avulsions sur le taux d’ORN.

Il s’agit d’une étude prospective à propos de 776 patients sur une période de dix ans, (2003- 2013), candidats à une RT adjuvante ou curative à haute dose (entre 64 et 77.6 grays au total) impliquant la mandibule et/ou le maxillaire. Avant RT, toutes dents jugées non conservables pour raisons parodontales ou endodontiques, ou enclavées ou incluses ont été extraites. Ont été avulsées aussi, le dents saines jugées difficilement accessibles à l’hygiène en anticipant un possible trismus postradique. Les autres dents ont été traitées par des moyens conservateurs. Chaque patient a bénéficié d’un détartrage préradique et d’un enseignement à l’hygiène orale. Pendant la RT, les patients étaient suivis chaque semaine avec un rappel des notions d’hygiène orale et une prévention fluorée par gouttières. Après RT, les patients étaient suivis tous les trimestres avec un détartrage et traitement des caries superficielles en cas de nécessité. Les patients étaient classés en fonction de l’état de leur denture : complètement dentés, complètements édentés, partiellement édentés de type I c’est à dire présentant des édentements restaurés par des prothèses fixes et partiellement édentés de type II c’est à dire présentant des édentements restaurés par des prothèses amovibles partielles ou non restaurés. Le diagnostic d’ORN était porté par un chirurgien maxillofacial et sa sévérité clinique était gradée sur une échelle de 3 à 5 selon plusieurs classifications en vigueur. 79% des patients étaient des hommes. 51 patients (6.6%) ont développé une ORN ayant nécessité un traitement chirurgical dont 11 étaient totalement édentés avant la prise en charge bucco-dentaire alors que 11 autres n’ont bénéficié d’aucune avulsion lors de cette prise en charge. De plus, chez les patients ayant développé une ORN aucune différence significative n’a été retrouvée entre ceux ayant bénéficié d’avulsions dentaires (quel que soit leur nombre) des autres patients. Le seul facteur significativement corrélé à la survenue d’une ORN fut un antécédent de chirurgie osseuse lors du traitement de la tumeur maligne. Bien d’autres résultats sont disponibles par sous-catégories de patients.

Commentaires

Sur le plan méthodologique, cette étude est très bien menée. Néanmoins, il est à souligner que la durée moyenne du suivi par patient n’est pas indiquée. Cependant, les résultats enregistrés sont éclairants puisqu’ils démontrent que l’incidence de l’ORN est indépendante du nombre de dents extraites lors d’une prise en charge bucco-dentaire pré-radique adaptée.


Clinical applications and effectiveness of guided implant surgery : a critical review based on randomized controlled trials.

Colombo M, Mangano C, Mjiritsky E, Krebs M, Hauschild U, Fortin T. BMC Oral Health 2017, 17 : 150-158.

Résumé :

De nos jours, les protocoles de mis en place d’implants dentaires sont très répandus partout dans le monde. Cependant, seules quelques études partielles sur le potentiel bénéfice thérapeutique apporté par la chirurgie implantaire guidée pour les praticiens comme pour les patients, souvent focalisées sur des aspects spécifiques comme la précision opératoire, sont disponibles à ce jour dans la littérature. L’objectif principal de cette revue est de faire le point sur les avantages et les inconvénients de la chirurgie implantaire guidée par rapport aux protocoles conventionnels en utilisant une méthodologie basée sur le niveau de preuve des études cliniques contrôlées et randomisées publiées en anglais entre les années 2000 à 2016. Une approche associant mots clés et morceaux de texte libre autour de 4 thèmes principaux (problème ; intervention ; contrôle ; devenir) d’où le terme d’approche PICO a été menée en interrogeant la base de donnée bibliographique MEDLINE et complétée par une recherche manuelle. 37 études ont été ainsi sélectionnées, 16 via MEDLINE et 21 par recherche manuelle complémentaire. Après lecture des résumés, seules 4 études remplissant tous les critères de sélection furent retenues. Après lecture critique des articles, seules 2 études furent jugées correctes sur le plan méthodologique, c’est à dire comparant chirurgie guidée versus chirurgie conventionnelle sur une période de suivi du succès implantaire pertinente, et servirent finalement pour élaborer cette revue critique. Ces 2 études ont pour objectif primaire d’analyser le taux d’échec prothétique, le taux de succès implantaire, les complications biologiques et prothétiques et comme objectif secondaire le taux de perte osseuse marginale péri-implantaire. Les deux évaluent également le ressenti du patient, l’une en terme de satisfaction, l’autre en terme de qualité de vie. Aucune différence significative n’a été enregistrée entre chirurgie guidée et chirurgie conventionnelle concernant l’ensemble de ces paramètres. Cependant, dans l’une des études, des suites opératoires inflammatoires et douloureuses significativement plus importantes ont été enregistrées pour le protocole conventionnel. Les coûts globaux sont discutés par les auteurs qui concluent au faible niveau de preuve apporté par ces deux études. Ils attirent aussi l’attention sur le manque de données concernant l’éventuelle indication spécifique d’un protocole de chirurgie guidée par rapport à un protocole conventionnel. Enfin, ils appellent à de futures recherches dans le domaine avec des critères d’évaluation superposables et pertinents.

Commentaires :

Les conclusions de cette revue, pour intéressantes qu’elles soient, sont à prendre avec un recul certain tant les données les sous-tendant sont pauvres au moins en nombre. De telle sorte qu’aucune recommandation fiable ne peut en être tirée sur le plan pratique (ce qui est également précisé par les auteurs dans leurs conclusions).