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Revue de littérature - Juin 2019

Revue de littérature SFCO Juin 2019. Pr. Boisramé


Baloda T, McBurnie ML, Macnow TE. A child with an unusual retained oral foreign body. J Emerg Med. 2019 Feb.

Quand je serai grand, je voudrai être menuisier …”

 

Résumé:

L’enfant qui grandit découvre son environnement et porte souvent les éléments à sa bouche. Les ingestions de diverses choses sont courantes : pièces de monnaie, billes, etc…Certains de ces corps étrangers de par leur aspect ou taille peuvent aller jusqu’à mettre la vie en danger. En 2016, au centre antipoison américain, 68 000 ingestions de corps étrangers chez des enfants ont été déclarées. La gestion de l’extraction d’un corps étranger nécessite de connaître les structures anatomiques, les molécules à disposition permettant d’aider à l’extraction. Les complications sont possibles (luxation des dents, luxation des ATM, lésions palatines, épiglottite, …) doivent être gérées.

Les auteurs rapportent le cas d’un garçon de 5 ans pris en charge aux urgences avec un cube de bois de 4,5 cm bloqué dans la cavité orale, à la suite d’une probable chute selon les enseignants de l’école où il était scolarisé. Les enseignants n’ont pas réussi à lui enlever. Le bloc en bois n’a pas causé de traumatisme sur les incisives mais la contraction réflexe musculaire associée à l’angoisse de l’enfant a empêché la dépose de ce bloc. Le patient n’avait aucun autre traumatisme, était alerte mais inquiet et n’arrivait pas à s’exprimer. Une injection intraveineuse de diazépam (0,1mg/kg) pour l’anxiolyse et le relâchement musculaire a été effectuée. Un pédiatre était présent et permettait de distraire l’enfant en lui apportant des explications adaptées à son âge avec une tablette numérique. Le patient était assis tête en avant et à l’aide d’un tenaculum le cube a été retiré.

Le diazépam a été considéré comme la molécule idéale du fait de ses effets anxiolytiques et de relaxation musculaire, de son apparition en 4 à 5 minutes et de son faible risque de complications respiratoires. D’autres molécules comme le propofol ou la kétamine auraient pu être proposées mais le fait de ne pas pouvoir obtenir de ventilations avec un masque ou l’inaccès pour une intubation orale ont éloigné le propofol qui comporte un risque de dépression respiratoire. La kétamine elle présente un risque de laryngospasme lors d’une stimulation palatine postérieure ce qui est le cas dans cette situation. De plus, la kétamine peut également augmenter le tonus musculaire et aggraver les spasmes musculaires, rendant l’extraction du cube de bois plus difficile.

Les auteurs mettent l’accent en fin de discussion sur les complications éventuelles dues à l’ingestion de corps étrangers situés profondément dans la cavité orale comme une épiglottite non infectieuse lié à la palpation digitale lors d’une tentative d’extraction ; les symptômes comprenant : dysphagie, bave, détresse respiratoire et stridor.

 

Commentaires :

Les corps étrangers conservés par voie orale sont rares chez les enfants et exigent de la part des professionnels de santé une approche prudente et une compréhension de l’anxiolyse pharmacologique. Ce cas montre également l’intérêt d’une implication multidisciplinaire dans ce genre de situation.

 

Du ZH, Ding C, Zhang Q, Zhang Y, Ge XY, Li SL, Yu GY. Stem cells  from exfoliated  deciduous  teeth alleviate hyposalivation caused by Sjögren syndrome. Oral Dis. 2019 May 2.

 

Cellules souches – l’origine de la Vie”

Cette équipe chinoise associant cliniciens et chercheurs a évalué dans le modèle murin du syndrome de Gougerot Sjögren (SGS) les effets d’une injection intraveineuse de cellules souches de dents temporaires exfoliées ou avulsées sur l’hyposialie.

En effet, la maladie de Gougerot Sjögren est une maladie auto-immune rare qui se manifeste par une fatigue chronique, une sécheresse oculaire et buccale. Actuellement, les thérapeutiques comme la pilocarpine, sialogogue agissant sur les cellules acineuses résiduelles encore fonctionnelles, traitent les symptômes-conséquences et non les causes de la maladie. Les thérapies à base de cellules souches offrent une nouvelle stratégie thérapeutique. Déjà, les cellules souches dérivées du tissu adipeux (ADSC) ont montré leur intérêt face aux dommages des glandes salivaires causés par la radiothérapie cervico-faciale et améliorent la sécrétion salivaire (Lim et al., 2013, Li et al., 2015). De plus, les cellules souches mésenchymateuses de la moelle osseuse et du cordon ombilical suppriment l’inflammation et améliorent la fonction des glandes salivaires chez un modèle murin et chez des patients atteints de SGS.

Au niveau des tissus dentaires, plusieurs sources de cellules souches ont déjà été identifiées :

pulpe dentaire, dents temporaires exfoliées, desmodonte, follicule dentaire. Les cellules souches isolées provenant de dents temporaires exfoliées (SHED) représentent une source de cellules souches intéressante obtenue à l’aide de techniques non invasives.

L’étude menée par cette équipe a eu pour objectifs d’évaluer l’effet des SHED sur l’hyposialie dans le SGS et d’étudier le mécanisme. Des SHED sont obtenues via une banque de cellules souches chinoises. Ces cellules souches mises dans une solution saline sont perfusés dans les veines de la queue de souris (modèle murin du SGS) ; un groupe contrôle reçoit une solution saline sans SHED. L’injection est effectuée une fois par semaine jusqu’à ce que les animaux atteignent 14 et 21 semaines.

Le débit salivaire a été mesuré après injection intrapéritonéale de pilocarpine. L’apoptose et l’autophagie ont été évaluées par TUNEL et Western blot. Les proportions de lymphocytes ont été détectées par un cytomètre de flux.

La sécrétion du débit salivaire stimulé a diminué chez les souris âgées de 21 semaines par rapport à celles de 7 et 14 semaines sans aucune variation significative au niveau de amylase, sodium, calcium,… L’utilisation des SHED a augmenté la sécrétion salivaire, réduit l’inflammation des glandes submandibulaires et réduit les taux de cytokines inflammatoires dans le sérum, les glandes submandibulaires et la salive totale. Les SHED ont diminué le nombre de cellules apoptotiques et les expressions de protéines autophages ATG5 et de Beclin-1 dans les glandes submandibulaires.

Les SHED n’ont aucun effet sur les autres organes. Cependant il est intéressant de noter que les cellules souches injectées ont migré vers la rate et le foie, et non vers la glande submandibulaire. Les SHED ont dirigé les cellules T vers les cellules Treg et ont supprimé les Th1 et Tfh dans les lymphocytes de la rate.

Ces SHED atténuent l’hyposalivation causée par le SGS en réduisant les cytokines inflammatoires, en régulant le microenvironnement inflammatoire et en diminuant l’apoptose et l’autophagie.

Commentaires :

Cet article intéressant laisse entrevoir les possibilités de l’utilisation des cellules souches d’origine dentaire (facilement récupérables) comme thérapeutique dans les syndromes secs. Des recherches concernant les cellules souches se poursuivent pour s’assurer du rapport efficacité-inocuité dans cette maladie insidieuse et sournoise.