Automédication et effets indésirables : au premier plan des hospitalisations, les AINS !
Dr Sarah Cousty
Schmiedl S, Rottenkolber M, Hasford J, Rottenkolber D, Farker K, Drewelow B, Hippius M, Saljé K, Thürmann P. Self-medicationwith over-the-counter and prescribeddrugscausing adverse-drug-reaction-relatedhospital admissions: results of a prospective, long-term multi-centre study. Drug Saf. 2014 Apr;37(4):225-35.
Résumé :
Cette étude, réalisée par une équipe Allemande, s’intéresse aux effets potentiellement délétères de l’automédication. Il s’agit d’une étude observationnelle multicentrique et prospective, menée en Allemagne, entre 2000 et 2008. Les dossiers médicaux de 212 000 patients des services de médecine interne de plusieurs hôpitaux sont analysés.Un total de 6 887 (3,2%) hospitalisations, est lié à un effet indésirable médicamenteux. 3,9% de ces effets indésirables sont le résultat d’une automédication : médicament en vente libre ou médicament anciennement prescrit au patient.
Si l’on s’intéresse au groupe des patients hospitalisés pour effet indésirable médicamenteux, la population des patients « automédiqués » est plus jeune et le plus souvent de sexe masculin. Ces patients présentent peu de pathologies associées (moins que dans l’autre population) et prennent par conséquent moins de médicaments. Globalement, la population des patients hospitalisés pour effet indésirable médicamenteux est âgée.
Au premier rang des effets indésirables liés à une automédication, on retrouve les hémorragies digestives, le plus souvent dues à la prise d’AINS à visée antalgique : aspirine, diclofénac puis ibuprofène. Dans certains cas, l’effet indésirable est lié à la prise de plusieurs spécialités différentes, contenant le même principe actif, de manière concomitante.
Les auteurs insistent sur l’importance des stratégies d’éducation thérapeutique et de prévention en particulier pour les patients âgés et polymédiqués. Une attention particulière est à porter lors de la prescription des AINS, notamment vis-à-vis des médicaments interférant avec l’hémostase.
Commentaire :
Cet article insiste sur la nécessité de rappeler à nos patients les risques liés à l’automédication. Nous devons rester vigilants, tout particulièrement à l’heure où le marché français des médicaments en vente libre est florissant, notamment sur internet.
Les antibiotiques toujours prescrits à tort ?
Dr Sarah Cousty
Rapport de l’ANSM « Evolution des consommations d’antibiotiques en France entre 2000 et 2013 », novembre 2014.
Résumé :
Au début des années 2000, face au développement des résistances bactériennes, l’Assurance Maladie lance une campagne d’information concernant la prescription des antibiotiques. L’objectif est de rationnaliser l’usage des antibiotiques afin d’en préserver l’efficacité. L’effet est positif avec une baisse notable de l’utilisation des antibiotiques entre 2002 et 2004.
Malheureusement, cette tendance n’a pas duré : depuis plusieurs années, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé, observe une augmentation de la consommation, accentuée en 2013. Au total, entre 2000 et 2013, la consommation d’antibiotique a baissé de 10,7% mais elle a augmenté de 5,9% depuis 2010.
En volume, environ 90% des antibiotiques sont prescrits « en ville ». Les pénicillines sont les plus utilisées (58% des antibiotiques en 2011), avec une augmentation de l’amoxicilline associée à l’acide clavulanique. Pour le secteur de ville, la France n’est plus le premier consommateur d’antibiotiques en Europe, comme c’était le cas au début des années 2000. En 2012, elle se situait au 4ème rang pour le secteur ambulatoire.A l’hôpital, la consommation française se situe dans la moyenne européenne.
En 2013, les génériques d’antibiotiques ont représenté 82,5% de la consommation d’antibiotiques en ville.
Commentaire :
Les données présentées dans ce rapport montrent que la situation française est loin d’être satisfaisante.
Le recours de plus en plus fréquent à l’association amoxicilline-acide clavulanique, est préoccupant car la justification n’a pas été démontrée dans toutes les situations cliniques.Parallèlement, le développement des souches résistantescrée déjà des situations d’impasse thérapeutique. L’introduction de nouvelles molécules ne peut pas être considérée comme une solution. L’innovation est en effet très peu active.
Les prescripteurs doivent s’efforcer d’établir une distinction entre les antibiotiquesde première ligne et les antibiotiques de recours qui, encore plus que les autres antibiotiques, doivent êtreconsidérés comme une ressource rare dont l’utilisation doit être limitée à des cas pleinement justifiés.