SFCO

Revue de littérature - Mai 2023

Radical vs conservative treatment of intraosseous ameloblastoma: Systematic review and meta-analysis

Faqi Nurdiansyah Hendra , Diandra Sabrina Natsir Kalla , Ellen M Van Cann , Henrica C W de Vet, Marco N Helder, Tymour Forouzanfar. Oral Dis, 2019 Oct;25(7):1683-1696.

 

Chirurgie conservatrice ou radicale dans les améloblastomes : revue de littérature et méta analyse

 

Le but de cette étude était d’évaluer les résultats des thérapeutiques chirurgicales radicales et conservatrices des améloblastomes uni et multiloculaires et de comparer leur taux de récidive. Cette revue a été menée selon les recommandations PRISMA. La recherche a été faite à partir des bases de données Pubmed, Embase, SCOPUS et web of science entre 1969 et mars 2018. 1557 articles ont été identifiés après exclusion des duplicatas, et 1514 études ont été exclues à la lecture du titre et de l’abstract. 20 études ont été retenues.

Introduction : L’améloblastome est une tumeur odontogénique épithéliale bénigne qui représente 1% de toutes les tumeurs et kystes des maxillaires. Cette tumeur apparaît en général entre 30 et 50 ans, et présente un taux important de récidive. Son siège de prédilection est la mandibule et notamment les secteurs postérieurs. Plus de 2/3 des améloblastomes sont liés à une mutation du gène BRAF V600E (impliqué dans la voie de signalisation protéine Kinase).

  1. L’OMS a redéfini en 2022 la classification des tumeurs odontogènes (1) : Les améloblastomes se répartissent en :
  2. Améloblastome conventionnel ou multiloculaire (le plus fréquent, entre 80% et 90% 2/Améloblastome uniloculaire
  3. Améloblastome périphérique extra osseux (extrêmement rare)
  4. Améloblastome adénoide
  5. Améloblastome métastasique

On s’intéresse dans cette étude aux 2 premières formes.
Cliniquement, la symptomatologie n’est pas spécifique, ces tumeurs se manifestent souvent par une croissante lente, une tuméfaction non douloureuse de la région massétérine. Le diagnostic est souvent retardé du fait de cette croissance lente avec parfois des découvertes fortuites.
Radiologiquement, les aspects sont variés, mais la forme la plus caractéristique est une image radioclaire, bien limitée, avec un aspect en « bulle de savon ».
Le traitement de référence est le traitement chirurgical qui se divise en 2 approches :

  • Chirurgie conservative : faisant intervenir marsupialisation, énucléation et curetage
  • Chirurgie radicale : résection osseuse partielle non interruptrice ou résection osseuse interruptrice avec vérification des limites d’exérèse. Parfois une chirurgie reconstructrice est associée.

Le choix dépend du type de la tumeur et sa présentation. La forme multiloculaire est souvent traitée de façon radicale.
Le suivi post opératoire doit être régulier et annuel pendant plusieurs années compte tenu de la récidive.

Résultats : Les résultats montrent que les taux de récidive sont statistiquement plus élevés avec une approche conservatrice, quelle que soit la tumeur.

Chirurgie Conservatrice

n= 341

Chirurgie avec résection

n= 364

Améloblastome polykystique

41%

8%

Améloblastome uniloculaire

21%

3%

Tableau 1 : Taux de récidive des améloblastomes en fonction du type d’améloblastome et du type de chirurgie.

 

Le choix des options chirurgicales face à un améloblastome reste aujourd’hui controversé. Les résultats de cette étude sont en accord avec des travaux précédents concernant les taux de récidive plus élevés avec une approche conservatrice.
En cas de survenue chez l’enfant et afin de ne pas altérer la croissance osseuse et de ne pas avoir de séquelle psychologiques, esthétiques et fonctionnelles, l’approche conservative est privilégiée dans un premier temps.
Une des limites de cette analyse est l’absence de données sur le délai de survenue de la récidive et sur l’absence de l’évaluation de la qualité de vie en fonction des options de traitements.
Cette revue souligne que (i) la forme multiloculaire est plus agressive que la forme uniloculaire en termes de taux de récidive et que (ii) la chirurgie radicale induit moins de récidive de cette tumeur.

Commentaire : Le diagnostic différentiel entre l’améloblastome, le kératokyste et le kyste dentigère est difficile et le diagnostic de certitude est anatomo pathologique.
Le CBCT dans le cadre d’une découverte d’une image radioclaire mandibulaire est une aide diagnostique qui permet une description précise sur l’expansion bucco linguale, la rupture des corticales, les résorptions dentaires permettent souvent d’avancer dans la démarche diagnostique
La précision de l’interprétation d’une imagerie CBCT peut être déterminante dans le choix de l’option thérapeutique, du site de la biopsie (2).

Le risque de récidive de ces lésions notamment l’améloblastome et le kératokyste, impose suivi et contrôles réguliers, et partenariat entre praticiens spécialisés dans ces chirurgies et praticiens qui assurent la prise en charge bucco-dentaire de ces patients sur le long terme.
Même si les données ne reposent actuellement que sur des rapports de cas, l’utilisation dans un futur proche des inhibiteurs de BRAF pourraient être prometteurs dans la réduction de la taille de la tumeur associé d’un traitement chirurgical. Ces données prometteuses doivent être confirmées par des études multicentriques. (3)

 

A Revue de litterature SFCO mai

B Revue de litterature SFCO mai 2

Figure 1 : Panoramiques de (A) Améloblastome et (B) d’un kératokyste (d’après (2)).

 

Références :

(1) Vered M, Wright JM. Update from the 5th Edition of the World Health Organization Classification of Head and Neck Tumors: Odontogenic and Maxillofacial Bone Tumours. Head Neck Pathol. 2022 Mar;16(1):63-75.

(2) Daniel Berretta Moreira Alves, Fabrício Mesquita Tuji , Fábio Abreu Alves , André Caroli Rocha , Alan Roger Dos Santos-Silva , Pablo Agustin Vargas, Márcio Ajudarte Lopes. Evaluation of mandibular odontogenic keratocyst and ameloblastoma by panoramic radiograph and computed tomography.Dentomaxillofac Radiol 2018 Oct;47(7):20170288

(3) Marcel Ebeling, Mario Scheurer, Andreas Sakkas, Sebastian Pietzka, Alexander Schramm, and Frank Wilde.BRAF inhibitors in BRAF V600E-mutated ameloblastoma: systematic review of rare cases in the literature. Med Oncol 2023 Apr 28;40(6):163